Ici, finies les collines en pente douce, le paysage dévoile des failles fracturant des reliefs abrupts où les vaches semblent avoir de la peine à déambuler, et indique au voyageur que seuls des événements dramatiques ont pu sculpter la péninsule de Banks. Sur la longue route sinueuse, un crachin insistant et un ciel bien gris nous enveloppent dune atmosphère presque inquiétante, allégée seulement par quelques courts intermèdes lors de la traversée de petits villages assez vivants aux éléments architecturaux parfois étonnants.

Les eaux calmes de la baie, les montagnes dont les sommets paraissent se perdre dans le brouillard nous feraient presque croire que nous sommes arrivées au bord du lac de Thoune, si ce n’est le drapeau français qui flotte dans le port d’Akaroa.

Si Jean Langlois, baleinier originaire du Havre, a bien possédé une partie de la péninsule, cela n’a duré que quelques mois. En effet, le temps d’un aller-retour pour recruter des colons, les terres de Nouvelle-Zélande étaient rattachées à la Couronne britannique par le traité de Waitangi de 1840. Aujourd’hui, les noms français attribués aux rues et aux restaurants, les vestiges d’un ancien cimetière servent d’argument touristique, avec peut-être même une pointe de dénigrement envers ces pauvres français décidément bien naïfs.

La pluie persistante transforme nos projets de randonnées en balades quotidiennes le long des quais et en visites à l’épicerie, notre seul point de connexion à Internet. Dimanche matin, une certaine agitation nous attire au bout du port où se déroule une course de bateaux-dragons qui mobilise des jeunes collégiennes maquillées façon « All Blacks » et des retraitées sérieusement entraînées. L’émulation règne, les familles donnent de la voix au bord de l’eau et les coachs embarqués sur les bateaux martèlent sur un tambour le rythme, donnant une cadence effrénée aux pagayeuses. Performances et victoires se fêtent autour de barbecues bien animés.

Nous avions prévu ce séjour à Akaroa avec appréhension en raison des secousses sismiques qui avaient agité notre visite de cette région il y a quatre ans. Cette fois-ci, les intempéries dans cet environnement inhospitalier dessiné par des activités volcaniques n’améliorent guère notre première impression ; nous quittons cet endroit avec soulagement, et même avec une certaine allégresse.

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