Les chemins de Kumano, reliant des sites et sanctuaires sacrés nichés dans les forêts pluviales des montagnes de Kii aux pentes abruptes, ont vu défiler au cours des siècles toute sorte de pèlerins, d’abord des aristocrates, puis des samouraïs et enfin des gens ordinaires. Aujourd’hui, comme sur le parcours de Saint-Jacques avec lequel Kumano est jumelé, les randonneurs arpentent les sentiers aux côtés de pèlerins qui effectuent la majeure partie de leurs déplacements en bus ou en voiture, mais n’oublient jamais de se recueillir et de timbrer leur petit carnet à chaque station. Un document, commun aux deux pèlerinages, permet même de regrouper tous les tampons nécessaires à l’obtention d’un certificat de super-pèlerin.

Pour nous, hélas, la pluie abondante et insistante s’est installée en même temps que nous dans la région, contrariant nos projets de marche et nous forçant à nous replier sur les centres de prière. Ainsi, au son du tambour et des clochettes, nous avons pu observer un rite de purification shinto. Au gré des visites, nous avons entrevu le syncrétisme existant entre les cultes shinto et bouddhiste, mais avons aussi constaté qu’il valait mieux éviter le mélange des genres. En effet, deux jeunes hommes s’étant incliné devant une statue de Bouddha avant de taper deux fois dans leurs mains, comme l’exige le rite shinto pour saluer une divinité, furent réprimandés très fermement par un moine bouddhiste veillant au grain.

À la fin de la cinquième journée d’arrosage, le soleil s’est mis à briller sur la terre détrempée et ruisselante, nous ouvrant une perspective de balade.

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Le lendemain, nous avons pris un autobus avec des pèlerins pour nous rendre au départ d’un chemin parcourant campagne et forêts et nous amenant au sanctuaire de Hongu vers lequel convergent tous les sentiers de Kumano. Nous avons traversé des hameaux aux maisons modestes entourées de coquets jardins potagers protégés par des filets, des fils électriques et des épouvantails étranges. L’âge plutôt avancé des habitants et le nombre de masures abandonnées témoignent du déclin de cette zone rurale dont l’activité s’exprime encore par les rizières investies de bruyantes grenouilles, les plantations de thé, les orangers en fruits et les cerisiers en fleurs animant les couleurs de ce printemps un peu terne.

Si le soleil a éclairé notre journée, c’est la rencontre avec une famille vaudoise qui l’a illuminée, nous permettant d’échanger librement nos impressions de voyage, nos émerveillements, mais aussi nos agacements, et de partager ainsi quelques bonnes crises de fou rire.

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